Table ronde autour de la parution de l’ouvrage Regards croisés sur la Rome ancienne et les Lumières

Table ronde
org. L. Boulègue et J.-L. Guichet, avec la collaboration de P.-S. Bebba
16 février 2024
UPJV, Citadelle, salle E. 205, 10h-12h15
en hybride
Autour de la parution de l’ouvrage
Regards croisés sur la Rome ancienne et les Lumières
Sous la direction d’Ida-Gilda Mastrorosa
Paris, Classiques Garnier, 2023

9h45 Accueil des participants
Conférenciers
Laurence Boulègue, UPJV, UR 4284 TrAme : Présentation de l’ouvrage
Stéphane Benoist, U. Lille, UMR HALMA : « Figures d’imperatores en contexte(s). Lectures modernes d’archétypes politiques »
Jean-Luc Guichet, UPJV, UR CERCLL : « Rousseau avec Plutarque et sans Plutarque

Répondante : I.-G. Mastrorosa
Participants : V. Bruni (UPJV), D. Bruno (UPJV-U. Florence, en visio-conférence) F. Maroye
(UPJV), G. Rossi (U. Vérone), C. Pedrazza Gorlero (U. Vérone, en visio-conférence)
Lien visio-conférence : https://u-picardie-fr.zoom.us/j/95911866980

Revest Clémence, Romam veni. Humanisme et papauté à la fin du Grand Schisme, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2021

Revest Clémence, Romam veni. Humanisme et papauté à la fin du Grand Schisme, Ceyzérieu, Champ Vallon, 2021, 424p.

Cet ouvrage met en pleine lumière un moment décisif mais relativement méconnu de la naissance du mouvement humaniste dans l’Italie du début du Quattrocento : ce n’est pas à Florence, mais à la cour des papes revenue à Rome que s’épanouit et s’affirme une nouvelle génération d’intellectuels, au sein d’un milieu cosmopolite, travaillant dans l’administration pontificale et au service des élites ecclésiastiques. Et c’est dans un contexte de crise profonde, le Grand Schisme d’Occident, que la papauté s’ouvre à l’idéal d’une Renaissance. Au fil d’une enquête croisant sources d’archives et œuvres littéraires, l’histoire de ce tournant est retracée, de l’afflux de jeunes lettrés en quête de fortune dans une institution divisée, aux débuts d’une révolution rhétorique et idéologique.

Cette recension a été publiée dans le Bulletin de liaison n°19 (2021) de la SEMEN-L (p. 74).

Coryciana. Livre premier. Épigrammes/Epigrammata (1524), introduction, texte, traduction et notes de Lydia Keilen, Paris, Belles Lettres, collection « Les Classiques de l’humanisme », 2020 (Laurence Boulègue)

Coryciana. Livre premier. Épigrammes/Epigrammata (1524), introduction, texte, traduction et notes de Lydia Keilen, Paris, Belles Lettres, collection « Les Classiques de l’humanisme », 2020, 122 p. (introduction) et 510 p. (texte, trad., notes), 45 €

La collection des Classiques de l’Humanisme porte à notre connaissance le premier livre des Coryciana, recueil de poèmes paru en 1524 à Rome. Ces poèmes ont vu le jour dans le contexte humaniste romain du début du XVIe siècle, autour de la personnalité de Johann Goritz (Corycius, qui donne son nom au recueil), protonotaire d’origine allemande, qui avait rassemblé autour de l’église de Sant’Agostino, située sur le Campo di Marzio, de nombreux auteurs et artistes afin de célébrer le culte de sainte Anne trinitaire. Une chapelle, consacrée à Sant’Anna Materza et adossée à une fresque de Raphaël (1511-1512), a été alors créée ainsi que l’institution d’un banquet poétique annuel, qui fut l’occasion pour ce cercle de se réunir jusqu’au Sac de Rome en 1527. Il s’agit de la première traduction française de ce livre original qui témoigne de l’intense activité du milieu poétique et artistique romain sous les pontificats de Léon X et de Jules II.

Lydia Keilen, en s’appuyant sur l’édition moderne des 372 poèmes qui composent le premier livre des Coryciana réalisée en 1997 par J. IJsewijn à partir de l’édition princeps de 1524, propose un texte qu’elle a entièrement vérifié en consultant ces deux éditions, et elle en donne la première traduction en langue vernaculaire. Ce premier livre est constitué d’une vaste épître dédicatoire de Blossius Palladius (commentée p. 251-263), riche d’enseignements sur les circonstances qui ont vu naître le volume, suivie de huit poèmes qui, dans la même veine, saluent la réalisation du volume et célèbrent la figure tutélaire de Goritz, et de trois-cent-soixante-trois poèmes (Icones), consacrés à sainte Marie trinitaire, à ses représentations artistiques dans l’église Sant’Agostino et à son culte. La traduction, vers à vers, n’est pas exempte de quelques lourdeurs, mais elle est fidèle et les notes qui l’accompagnent éclairent utilement non seulement les allusions culturelles et cultuelles, mais aussi les auteurs, leurs sources et références, ainsi que les jeux poétiques d’intertextualité et d’émulation auxquels ils se livrent dans leur propre cercle et avec leurs contemporains.

La vaste étude introductive (p. IX-CXXXI) présente le contexte culturel et religieux dans lequel le projet a pris naissance et les circonstances de la genèse du volume dont la parution fut, semble-t-il, retardée par l’instigateur lui-même. La personnalité et le rôle de Johann Goritz au sein du milieu pontifical romain fait également l’objet d’un point nécessaire. L’étude présente ensuite le personnage de sainte Anne, son culte et ses représentations, ainsi que le lieu même du culte auquel l’ouvrage est intimement lié, à savoir l’église de Sant’Agostino, ses chapelles et ses œuvres d’art : la sculpture d’Andrea Sansovino, sujets de nombreux poèmes du recueil, et l’Isaïe de Raphaël, fresque qui se trouve au-dessus de la sculpture. Dans un troisième temps, sont étudiés le recueil de poèmes lui-même et sa composition, Lydia Keilen formulant des hypothèses argumentées sur la façon dont les textes qui le composent ont été retenus. Il s’agit d’un travail rigoureux qui révèle les attraits et l’originalité de son sujet.

Les Coryciana sont un ouvrage singulier, en tant qu’objet littéraire et en tant qu’objet culturel, qui saura surprendre le lecteur érudit ou simplement curieux.

Laurence Boulègue UPJV-UR 4284 TrAme

Cette recension a été publiée dans le Bulletin de liaison n°18 (2020) de la SEMEN-L (p. 58-59).