Interpréter et traduire le vocabulaire scientifique : promenades philologiques – IRHT – Campus Condorcet Aubervilliers

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  • 9h30-9h45: Ouverture (François BOUGARD) ; introduction (Jean-Charles COULON et Marie CRONIER)
  • 9h45-10h20 : Jean-Pierre ROTHSCHILD (IRHT, Section latine et Section hébraïque), Enjeux de la dénomination des disciplines et de leurs praticiens en hébreu au Moyen Âge

À la faveur de travaux sur les traductions scientifiques, le vocabulaire hébreu spécialisé des disciplines a fait l’objet de maints glossaires ou études (en logique, astronomie, médecine, botanique, philosophie morale). Cependant, des termes-clefs de la désignation des disciplines mêmes ne sont pas cernés avec précision : reçus comme allant de soi ou au contraire perçus comme engageant des questions complexes de définition et de hiérarchie des savoirs. Il sera question ici de ḥokhmah, «science» ou «sagesse» / ḥakham, «savant ou sage» ; de l’adjectif kollel «général», en référence aux universaux (au Moyen Âge) ou à une totalité des savoirs (à la Renaissance) ; d’elahut, «divinité», «métaphysique» ou «théologie» / elohi, «divin», etc. ; de pilosof et de mitpalsef, «celui qui prétend philosopher».

  • 10h20-10h55 : Iolanda VENTURA (Università di Bologna), Une traduction qui n’en est pas une : le point sur le corpus du Ps.-Mésué.

Le corpus du Ps.-Mésué fait son entrée dans la culture médicale occidentale au milieu du XIIIe siècle. Présenté comme une traduction de l’arabe produite en Égypte par les soins (ou sous le mécénat) d’un Magister Flodus de Sorrento, il connaît un succès rapide. Aucun original arabe n’a pas pu être découvert jusqu’à présent. Le but de ma communication est de reprendre quelques indices tirés du contenu et du langage technique relatif à la pharmacopée et à la pharmacie pour essayer de faire le point sur la possible identification, à défaut de l’original, d’œuvres similaires, et de comprendre la nature – traduction d’un texte ou assemblage de matériaux – du corpus du Ps.-Mesué.

10h55-11h25 : Pause

  • 11h25-12h00 : Isabelle DRAELANTS (IRHT, Section latine), Le vocabulaire de l’entomologie médiévale, ses termes génériques et ses néologismes.

Créditée d’immobilisme, l’entomologie médiévale n’a pour ainsi-dire pas fait l’objet de recherches. Il est un fait que le vocabulaire, assez rare, désignant les vermes n’a pas beaucoup évolué entre les Étymologies d’Isidore de Séville (622) et de début du XIIIe siècle. Les encyclopédies naturalistes du milieu du XIIIe siècle accompagnent par un accroissement important des espèces nommées la nouvelle diffusion de l’Histoire naturelle de Pline et la redécouverte de la Zoologie d’Aristote dans la traduction arabo-latine de Michel Scot. Celle-ci introduit des substituts – annulosa et rugosa – à la place d’insecta pour désigner les « petits animaux segmentés ». Le changement s’accentue avec l’assimilation de l’Abbreviatio super librum De animalibus d’Avicenne (du même traducteur), observée surtout chez Albert le Grand. Dans une volonté explicative typique de la philosophie naturelle, le dominicain adopte les nomenclatures élargies des encyclopédistes et les néologismes du traducteur d’Aristote et d’Avicenne. On se propose de faire rapidement l’histoire de cette évolution, en soulignant l’élargissement du regard sur les insectes à partir de 1200 et l’arrivée dans le paysage entomologique de quelques nouveaux mots qui n’auront pas toujours le succès qu’ils auraient mérité.

  • 12h-12h35: Jean-Patrice BOUDET (Université d’Orléans), La naissance du vocabulaire astronomico-astrologique en ancien français : quelques remarques

Vers 1270, sont élaborées les premières traductions en français de traités d’astronomie et d’astrologie (une huitaine de textes, dont trois traduits du latin et cinq de l’hébreu), une remarquable compilation relevant de la science des étoiles, L’introductoire d’astronomie, et les plus anciennes tables astronomiques en français accompagnées de leurs canons. Après une rapide description de ce corpus en grande partie inédit et du contexte dans lequel il s’inscrit, on examinera dans sa diversité le nouveau vocabulaire technique qui y est employé et sa postérité différentielle.

12h35-14h15 : Déjeuner

  • 14h15-14h50 : Marie CRONIER (IRHT, Section grecque), Un lexique trilingue de la pharmacopée (grec, latin, arabe) : le Breviarium de Stéphane d’Antioche.

Originaire de Pise et installé à Antioche dans les années 1120, Stéphane y traduit de l’arabe en latin sous le nom de Regalis dispositio la grande encyclopédie médicale connue comme le   d’Al-Mağūsī. En annexe, il ajoute un Breviarium, lexique alphabétique des termes de la pharmacopée organisé en trois colonnes (grec, arabe, latin) et encore inédit. La présente communication s’intéressera à la façon dont ce lexique a été constitué et tentera d’identifier ses sources, pour apporter une nouvelle pièce à l’étude du multiculturalisme et du multilinguisme à Antioche au XIIe siècle.

  • 14h50-15h25 : Thibault MIGUET (Université de Paris-Est Créteil), Traduire en grec le vocabulaire médical arabe dans la Sicile du XIIe siècle : l’exemple du Viatique du voyageur d’Ibn al-Ǧazzār.

La traduction grecque de l’encyclopédie médicale arabe du Viatique du voyageur a été effectuée en Sicile, probablement autour du début du XIIe siècle. Il s’agit d’une traduction très littérale qu’il n’est par moments par possible de comprendre sans l’aide du texte arabe. Elle pose donc des problèmes intéressants de traductions de mots (concepts médicaux, maladies). Nous nous concentrerons sur la traduction du vocabulaire de l’imagination, et nous interrogerons sur l’emploi occasionnel de termes grecs très rares (hapax ou quasi-hapax, mots littéraires), qui détonnent dans cette traduction apparemment très fruste de l’arabe.

15h25-15h55 : Pause

  • 15h55-16h30 : Jean-Charles COULON (IRHT, Section arabe), Le Kitāb al-Aḥjār (Livre des pierres) attribué à Aristote du Moyen Âge aux études orientalistes.

L’identification des pierres est une difficulté des textes scientifiques médiévaux. Un nom arabe peut, selon le contexte, désigner plusieurs pierres, comme deux noms peuvent désigner la même pierre. De là, les lapidaires sont particulièrement importants pour notre connaissance de la minéralogie. C’est en ce sens que l’apocryphe Kitāb al-Aḥjār (Livre des pierres) attribué à Aristote a été abondamment étudié dans les études orientalistes.

Inscription obligatoire :

https://www.irht.cnrs.fr/fr/agenda/journee-thematique/interpreter-et-traduire-le-vocabulaire-scientifique-promenades/inscription

Programme_Journée-Thématique 2022

Virginie Leroux et Émilie Séris (dir.), Théories poétiques néo-latines, Genève, Droz (Texte courant, 6), 2018. (Danièle James-Raoul)

Virginie Leroux et Émilie Séris (dir.), Théories poétiques néo-latines, Genève, Droz (Texte courant, 6), 2018, 1166 p.

On ne peut que se réjouir de la parution de ce beau gros volume tant attendu qui s’inscrit dans le renouveau global des études sur la théorie littéraire ayant marqué les dernières décennies. L’ouvrage dirigé par V. Leroux et É. Séris, auquel ont participé L. Boulègue, A. Bouscharain, S. Conte, L. Hermand-Schébat, Laigneau Fontaine, A.-P. Pouey-Mounou, complète avantageusement des éditions de traités et des études de poétique récentes, notamment proposées par P. Galand-Hallyn et F. Hallyn (dir.), Poétiques de la Renaissance : le modèle italien, le monde franco-bourguignon et leur héritage en France au XVIe siècle, 2001 ; Fr. Goyet (éd.), Traités de poétique et de rhétorique de la Renaissance, 2001 ; J.-Ch. Monferran (dir.), La muse et le compas : poétiques à l’aube de l’âge moderne, 2015).

Il offre une vision synthétique des textes théoriques latins essentiels qui, rédigés depuis le Trecento jusqu’à la fin du XVIe siècle, dans une grande partie de l’Europe (en France, en Italie, en Allemagne et dans les Flandres), ont nourri la poétique de la Renaissance. Outre les arts poétiques néo-latins publiés au XVIe siècle dont des extraits sont donnés (étant donné leur ampleur, il était impensable de les publier intégralement), ont été prises en compte des théories présentes ici et là, parfois éparpillées, parfois regroupées, tous textes emblématiques édités, traduits et présentés.

Le plan en cinq chapitres rend compte des thématiques les plus fréquemment abordées dans les traités. Le premier est consacré à la légitimation de la poésie à laquelle s’attachent principalement les premiers textes théoriques et qui demeure un passage obligé des traités ultérieurs, même quand son importance aura décru, à partir des années 1550 ; cette légitimation est fondamentale dans l’élaboration de la théorie poétique. Le second chapitre traite de l’inspiration : souvent mentionnée à propos de la défense des poètes (leurs dons sont-ils d’essence divine ou sont-ils innés ?), elle a gagné une place autonome et une ampleur particulière en raison de la diffusion du néo-platonisme, de l’astrologie et de la théorie médicale des humeurs. La question de l’imitation, orientée doublement par l’intertextualité et l’écriture de la fiction, occupe le troisième chapitre : il s’agit, d’une part, de déterminer quels modèles antiques imiter et comment les imiter et, d’autre part, de réfléchir à la représentation du réel, à cette mimèsis dont la place s’accroît à mesure que se multiplient les commentaires sur la Poétique d’Aristote. Le quatrième chapitre porte sur les genres poétiques : bien que les questions du mètre et du style soient parfois envisagées séparément, comme chez Scaliger, elles sont le plus souvent liées à celle du genre. Le cinquième et dernier chapitre est consacré aux relations qu’entretient la poésie avec les autres arts : non seulement les théoriciens humanistes élaborent des classifications du savoir au sein desquels il importe de situer la poésie, mais la théorie poétique emprunte en outre copieusement aux théories qui modèlent les autres arts. L’étude de la poétique s’ouvre ainsi sur la perspective plus large des arts libéraux.

L’ouvrage s’achève sur une bibliographie très copieuse (68 p.), quoique limitée aux textes humanistes et aux études critiques portant sur la période de la Renaissance, un Index nominum, un Index des notions très précis (aussi bien des motifs que des termes techniques), qui permettent de circuler aisément dans le volume.

Nul doute que ce bel ouvrage devienne un outil de référence fondamental !

Danièle James-Raoul

Cette recension a été publiée dans le Bulletin de liaison n°16 (2018) de la SEMEN-L (p. 44-45).

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Les humanistes ont joué un rôle essentiel dans l’élaboration de la critique littéraire et la constitution de la poétique comme discipline distincte de la grammaire et de la rhétorique. Ils ont conditionné la réception des traités antiques, en particulier la Poétique d’Aristote et l’Art poétique d’Horace, et ont problématisé des concepts appelés à une grande fortune, comme la mimèsis, la catharsis, le decorum ou l’ut pictura poesis. Ils ont apporté des éléments théoriques originaux, élaboré des taxinomies génériques complexes et repensé les systèmes de classification des arts. Cette anthologie offre une vision synthétique des textes théoriques latins en Europe, du Trecento au XVIe siècle. Elle présente les principaux penseurs et leur art poétique, analyse les notions clefs et propose un choix de textes emblématiques, édités, traduits et contextualisés. Un bel outil de travail pour penser l’utilité de la poésie, la création, l’histoire littéraire et les normes esthétiques.

Cette seconde recension a été publiée dans le Bulletin de liaison n°16 (2018) de la SEMEN-L (p. 46).

Publications récentes (septembre 2016)

Pour accéder à une bibliographie indicative des ouvrages parus au cours de l’année universitaire 2015-2016 dans les domaines médio- et néo-latins, veuillez cliquer sur le lien suivant : Publications récentes (septembre 2016).
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