L’Antiquité selon Guillaume Budé – À l’école d’un humaniste érudit

Nous signalons la parution d’un ouvrage de Romain Menini et Luigi-Alberto Sanchi, L’Antiquité selon Guillaume Budé. À l’école d’un humaniste érudit, le 15 janvier 2025, aux Belles Lettres dans la collection « Essais ».

Cliquez sur ce lien pour lire la présentation sur le site de la maison d’édition : https://www.lesbelleslettres.com/livre/9782251456584/l-antiquite-selon-guillaume-bude.

Parmi les géants de son temps, Guillaume Budé tient une place à part. Il est assurément le plus singulier des lettrés français de la première Renaissance. Contemporain d’Érasme et de Thomas More, il posa comme nul autre avant lui – mais aussi après lui, peut-être – la question des humanités en France, ainsi que les bases d’une réflexion nationale en la matière. Parallèlement à son rôle dans la politique culturelle du royaume, ses ouvrages montraient la voie encyclopédique d’études qui n’entendaient laisser de côté aucun domaine de la connaissance antiquaire : philologie du Digeste, patristique, lexicologie du grec ancien, érudition numismatique, histoire économique. Autant de domaines qui, de nos jours, n’apparaissent plus guère dans un cursus de lettres classiques, voire d’histoire ancienne. Or les recherches savantes auxquelles Budé s’adonna tout au long de sa vie ne sauraient être comprises, dans leur portée et dans leur signification, qu’en étant replacées dans le contexte qui fut le leur. Sans cet effort historique – lequel était déjà au fondement de la démarche même de Budé face à l’Antiquité –, nous risquons de nous heurter à un monde incompréhensible. Ainsi sonnait déjà la leçon des écrivains de la « Renaissance » : c’est en tentant de comprendre de l’intérieur les civilisations révolues, dans toute la diversité de leurs préoccupations – et quitte à mesurer ce qui nous en sépare –, que nous en pourrons tirer les enseignements les plus utiles à notre temps.

TABLE DES MATIERES

Avant-propos
Qui était Guillaume Budé ?

Budé, géant héroïque des lettres françaises
Quelques éléments de biographie

Saisir Protée : contours de l’encyclopédie budéenne
Au filtre de la manière budéenne
Une érudition de grand style
L’invention d’un nouveau genre d’écriture
Inventer l’« encyclopédie » : cercle et périphrases
Saisir Protée : inattingible, l’Antiquité ?
Quel « discours de la méthode » ?
Une périodisation d’humaniste
Le premier millénaire avant notre ère : convergence des histoires sainte et classique
De l’Antiquité classique à la fin de la civilisation antique
Trois massifs philologiques
Annotationes in Pandectas
De Asse
Commentarii linguæ græcæ
Dans l’atelier de l’humaniste : Budé parmi ses livres
Budé correcteur de lui-même
Notes, fiches et carnets
Livres annotés
La bibliothèque de Budé
Un exemple : Démosthène manuscrit et imprimé
Les nouveautés de la librairie aldine
Livres prêtés, livres empruntés : le réseau budéen

Le philologue au travail : chemins de la recherche érudite

Droit romain, morale et anthropologie
Le droit chez les éléphants et les bêtes sauvages
L’épineuse question de l’équité
Des centumvirs à la Vulgate : Budé et la Bible
De l’entéléchie (Aristote) à la loi d’Adrastée (Platon)

Un point de départ : la doxographie du pseudo-Plutarque
Le De Asse et la ψυχή selon Aristote et Cicéron
Cicéron et Politien au pilori
Le corpus aristotélicien et ses commentateurs
Platon, inadmissible païen ou sage préchrétien ?
La loi Adrastia
Fortune, hasard, nécessité, liberté
Philosophie e(s)t Éloquence
La fabuleuse histoire du million de sesterces
En premier lieu, constater le problème et son étendue
Ensuite, échafauder la démonstration résolutive
Enfin, montrer les avantages scientifiques de la solution obtenue
Deux ouvrages pour deux publics
Défense et illustration de la langue grecque
Une constante : l’apologie pour une « langue géniale »
Suite du panégyrique… en français
Le lexique grec, corne d’abondance
L’étude du grec, rempart nécessaire contre le purisme
Dithyrambe pour Philoponie
L’ascèse et l’exégèse : Budé lecteur des Pères grecs
Les Pères cappadociens, figures tutélaires
Vie solitaire, sodalités spirituelles
Ascèse de la philologie, philologie de l’ascèse
« Denys le Grand » : le rayonnement et l’énigme
Sur la foi de l’apocryphe : le sublime du pseudo-Denys

Guillaume Budé, bâtisseur de la modernité française

Budé en son temps, Budé pour notre temps
Du « tonneau » de Diogène….
… à l’Hercule gaulois
Le Gymnase de Marseille, puis le Collège de France
Une nouvelle école française d’érudition
Un héritage aux contours extensibles
L’inventeur de la monographie savante ?

Ouverture : L’Antiquité selon Budé est-elle l’avenir des études anciennes ?
Notes
Aperçu de la bibliothèque de Guillaume Budé
Tableau chronologique des œuvres de Guillaume Budé
Bibliographie
Index nominum

Boulègue, L., Perrin, M., Veyrard-Cosme, Chr., Ascèse et ascétisme de l’Antiquité tardive à la Renaissance. Traditions et remises en causes, Paris, Classiques Garnier, 2021 (Jordi Pià-Comella)

Boulègue, L., Perrin, M., Veyrard-Cosme, Chr., Ascèse et ascétisme de l’Antiquité tardive à la Renaissance. Traditions et remises en causes, Paris, Classiques Garnier, 2021, 412 pages.

Les notions d’ascèse et d’ascétisme suscitent un regain d’intérêt, depuis notamment en France les célèbres études de P. Hadot, Exercices spirituels, et de M. Foucault, L’herméneutique du sujet. Les travaux rassemblés par L. Boulègue, Ch. Cosme et M. Perrin comblent une lacune majeure : ils offrent la première synthèse des théories et pratiques de l’ascèse de l’Antiquité tardive à la Renaissance jusqu’à la Contre-Réforme.

La tension, bien contextualisée dans l’introduction de l’ouvrage, entre le caractère mouvant des notions d’ascèse et d’ascétisme au cours du temps, et leur unité – on retrouve d’une époque à l’autre des motifs communs – a conduit logiquement les auteurs à opter pour une étude thématique en trois temps : d’abord, les théories et pratiques de l’ascèse ; ensuite, les écritures de l’ascèse ; enfin les figures de l’ascèse. Suivent une très riche bibliographie, deux indices des auteurs/ artistes et biblique, les résumés, ainsi qu’une table des figures. Les mérites de l’ouvrage sont multiples. D’abord, le livre apporte une profondeur diachronique inédite aux notions d’ascèse et d’ascétisme. On saisit beaucoup mieux, par exemple, tout ce que la poésie amoureuse et érotique d’un Pétrarque et d’un Ronsard doit au topos hiéronymien de l’ascète solitaire. Ensuite, le livre aborde le problème en couvrant un champ considérable de disciplines : de la littérature tardo-antique à la poésie médicale du XVe siècle, en passant par la patristique, la littérature mérovingienne, l’épistolaire érasmien, la philosophie humaniste, l’hermétisme ou l’architecture flamboyante d’un Jean de Felin. Le pari pluridisciplinaire est réussi : il nous permet, par exemple, de comprendre que la figuration de l’ascèse ne s’incarne pas simplement dans des personnes mais qu’elle peut aussi s’exprimer dans l’art monumental du XVIe siècle. Or, loin de sombrer dans la dispersion, Ascèse et ascétisme présente une cohérence forte : le choix des thèmes traités fait ressortir les permanences de certains motifs tout en en épousant les variations au fil du temps, d’un genre à l’autre, selon les sensibilités religieuses, idéologiques et esthétiques de chacun. Qu’il s’agisse de l’aspiration à la transcendance, qui passe souvent par le rejet de toutes les tentations terrestres, de l’opposition entre repli sur soi et ouverture aux autres, du choix entre une ligne dure de l’ascèse et une ligne modérée, ou bien de l’opposition entre simplicitas et exhibition. Tous ces motifs parcourent l’ensemble des articles, donnant une unité puissante, jamais rigide, au tout. Dans sa très belle préface au livre, M. Aurell résume l’esprit qui anime d’un bout à l’autre Ascèse et ascétisme : « L’ascèse prend ainsi de nouveaux visages. Quoi qu’il en soit de ses mutations, elle préside, aujourd’hui comme hier, au travail intellectuel de qualité, mais plus encore au dépassement personnel en quête d’un idéal supérieur ».

Jordi Pià-Comella Sorbonne-Nouvelle (CERAM ED 173) IUF

Cette recension a été publiée dans le Bulletin de liaison n°19 (2021) de la SEMEN-L (p. 76-77).

Vie d’Isarn, abbé de Saint-Victor de Marseille (XIe siècle) , présentation, édition, traduction et notes par Cécile Caby et alii, Paris, Les Belles Lettres (« Classiques de l’histoire du Moyen Age »), 2010

Vie d’Isarn, abbé de Saint-Victor de Marseille ( XIe siècle) , présentation, édition, traduction et notes par Cécile Caby et alii, Paris, Les Belles Lettres (« Classiques de l’histoire du Moyen Age »), 2010.

Rédigée en latin dans les années 1070, la Vie d’Isarn (mort en 1047), l’un des très rares textes narratifs provençaux de cette époque, met en scène un jeune aristocrate originaire du Languedoc, devenu moine à Saint-Victor de Marseille vers l’an mil. Le récit fait le portrait d’un religieux exemplaire, devenu prieur, puis abbé, dont l’ascèse étonnait ses contemporains, comme Odilon de Cluny. Il campe également un grand seigneur monastique, préoccupé par la défense des droits, des terres et des prieurés de la maison marseillaise, chevauchant à travers la Provence pour protéger ses religieux et les paysans des méfaits de potentats locaux (d’après la notice du site des Belles Lettres).

Cette recension est extraite du Bulletin n°6 de septembre 2010 (p. 12-13).